Un français sur deux pour que le cannabis soit chez les buralistes

Jean-Yves Nau publie sur son très bon blog un article particulièrement éloquant …

weedhollandeC’est l’un des résultat d’un sondage IPSOS, réalisé à la demande de SOS addictions, du Conservatoire national des arts et métiers (Cnam) et du laboratoire interdisciplinaire d’évaluation des politiques publiques (Liepp) de Sciences Po. Un quart du millier de personnes sondées ont reconnu avoir déjà fumé au moint une dose de cannabis, …….

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https://jeanyvesnau.com/2016/10/09/drogues-un-francais-sur-deux-est-pour-que-le-cannabis-soit-en-vente-chez-les-buralistes/

 

La Belgique semble ne pas avancer ( ou si peu et si lentement ) quant à sa « politique Drogues » : faux semblant ou sables mouvants ?

 

Le WE dernier, je vous disais, à la lecture de l’avant-dernière livraison de l’ OBS, qu’il y a 20 ans déjà, je manifestais aux côtés de mes  (alors) jeunes collègues du secteur en compagnie d’édiles locaux et de sommités scientifiques (un peu fleuries aussi ), derrière le mot d’ordre  » Légalisez le Cannabis « , et oubliais de déclarer, on me l’a fait judicieusement remarquer, que ce point était toujours à l’ordre du jour des agendas politiques en France, en Belgique, et, à quelques exceptions près, de l’immense majorité des états de ce Globe.

Est-ce à dire que rien n’a changé dans le statut des drogues en général, des illégales, plus particulièrement, et, de façon plus pointue encore, des dispositifs susceptibles d’améliorer les conditions de vie des consommateurs supposés comme de plus en plus nombreux en ce monde de plus en plus follement sous influence ?

Eh bien, oui et non, sera ma réponse de normand mais plutôt oui, en ce qui concerne la posture prohibitionniste et la frilosité quant au développement du pilier de la Réduction des Risques ?

A cette question, il me faut déclarer ce que je pense  depuis fort longtemps à savoir que les moyens orientent les fins et qu’en ce qui concerne les drogues, ceux qui sont « chargés » par les classes politiques locales et supralocales d’instruire les décisions sont exclusivement choisis pour leur capacité à caresser les contradictions dans le sens du compromis et leur adhésion au principe d’homéostasie « politique » à même de garantir leur maintien aux postes de recherche et d’action ( les dernières nominations de représentants à la Cellule Drogue en témoignent à loisir ) .

Pendant que le terrain socio-sanitaire se frotte, au quotidien, aux réalités des citoyens qui subissent, entre autres pathologies diverses, jusque dans leur chair, leur psychisme, leur vie relationnelle, leur statut social, les dommages liés à la prohibition des drogues ( en ce compris les effets de celle-ci sur les dispositifs de prévention, d’aide et de traitements), les décisions « politiques » se prennent et, surtout, ne se prennent pas :

  • au mépris de toutes les évidence issues des expériences réalisées à l’étranger,
  • en commandant, par « abus de précaution », des études longues et coûteuses à des académies dépendantes, études qui, au final, seront interprétées  en fonction de présupposés « idéologiques » préétablis par le commanditaire,
  • en fonction d’agendas hautement sensibles aux enjeux électoraux et consensus supra – nationaux
  • soutenues par des experts désignés en fonction de leur couleur ( politique ) ou de leur odeur ( de sainteté mentale )
  • qui surfent sur les peurs et les préjugés des citoyens insécurisés par les discours de guerre aux drogues réputées radicalement et exclusivement dangereuses,
  • au prétexte d’idéaux ( vivre sans drogue ) en contradiction d’avec les des propriétés addictogènes des sociétés modernes.

Vous voulez un exemple peut-être : en décembre 1996, le Groupe DELCOH-GB ( délivrance contrôlée d’héroïne – groupe bruxellois ) invite le Prof. UCHTENHAGEN de Bern à Bruxelles pour présenter l’expérimentation de délivrance contrôlée d’héroïne menée en Suisse sous sa direction hautement universitaire et les premiers ( bons ) résultats (insertion sociale, santé et diminution de la délinquance associée secondaire ) devant un panel de décideurs et de professeurs belges de nos grandes universités catholiques et laïques ( lire archive du Soir sur cet event ).

Tadam

En 2007, 10 ans plus tard et alors que les dispositifs de traitements par diacétylmorphine se multiplient en occident , une expérimentation menée par la Ville de Liège sous la tutelle scientifique de l’ULg est très lentement mise sur pied, à grand coût fédéral, et se déroulera deux ans durant moyennant un montage financier  ( la Fondation TADAM qui dispense un opérateur officiel de s’engager ) et organisationnel d’une lourdeur impressionnante. Le projet reconnu comme pertinent et sécure (Conclusions scientifiques et recommandations) est pourtant interrompu, en janvier 2013, les patients renvoyés à leur héroïne de rue. L’état fédéral n’a toujours pas examiné  les projets de loi  déposés dans la foulée par le « mayeur de Liège »  et dont le vote pourrait autoriser l’implémentation de ce type de dispositif  hors le cadre de recherche.

Alors qu’en Suisse, mult referundum populaires plus tard, le dispositif perdure depuis 20 ans, avec près de 20 centres de délivrance sur  toute la confédération, en Belgique, la ministre FONCK se dit scandalisée par la proposition DEMEYER ( à voir ci dessous )

Propositions de loi visant à encadrer l’usage de drogues dures à Liège                                   Suite à l’expérience pilote « TADAM », j’ai déposé au Sénat, deux propositions de loi visant à encadrer l’usage de drogues dures. La première concerne la légalisation des salles d’injection et la seconde, le traitement de substitution par la diacétylmorphine.

Pour en savoir plus, je vous invite à consulter les différents liens ci-dessous.

Proposition de loi modifiant la loi du 24 février 1921 concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, psychotropes, désinfectantes ou antiseptiques et des substances pouvant servir à la fabrication illicite de substances stupéfiantes et psychotropes, visant à la reconnaissance.

Proposition de loi modifiant la loi du 24 février 1921 concernant le trafic des substances vénéneuses, soporifiques, stupéfiantes, psychotropes, désinfectantes ou antiseptiques et des substances pouvant servir à la fabrication illicite de substances stupéfiantes et psychotropes, visant à la reconnaissance légale du traitement assisté par diacétylmorphine.« 

Cette résistance au sein même de la majorité wallonne montre comment l’évidence basée sur l’expérience est encore incapable aujourd’hui de modifier les pratiques médicales lorsqu’elles concernent les usagers de drogues ( cf. le Baclofène et l’e-cigarette ).

Il est tentant de faire porter la responsabilité de cette inertie sur la complexité institutionnelle belge laquelle impose un compromis politique excluant tout progrès un tant soit peu  » idéologiquement » chargé. Le nombre important de Rendez-Vous électoraux à tous niveaux favorise sans conteste la frilosité des options politiques alors même que la classe « académique » semble aujourd’hui unanime … lorsqu’on l’interroge ou lorsqu’elle peut en tirer quelque source de financement pour une antépénultième recherche avant l’action.

cannabis1

Alors, pour ce qui concerne les changements législatifs portant sur l’usage  » récréatif » et  » personnel » du cannabis, la valse hésitation a encore bien plus de mille temps devant elle !!!

A cet égard, tout est permis, comme le démontre « potopot » rendu public hier, dans le Monde, concernant le sort d’un rapport commandé par E. Valls et mis sous son propre coude pour raison de  » conclusions politiquement incorrectes  » ( voir l’article ).

Pourquoi rien ne bouge sinon parce que ce type de changement réclame une stabilité politique et un climat social plus « sécure » !  

En temps de grandes turbulences, les cécités politiques sont confortées, les symptômes (les consommations drogues) se confondent d’avec les causes (les économies parallèles dans les sociétés de performance), l’histoire en a fait un de ses principes directeurs, les postures se raidissent, se radicalisent, les tolérances s’annulent, les peines de mort ressortent du bois et la force écrase l’intelligence hors service et synonyme de faiblesse quand la guerre fait rage.

La drogue à nouveau rime avec violence ( les djiadistes de l’EI sous amphétamines, l’employé communal trafiquant de la drogue à Ribaucourt, les proviseurs français s’inquiètant après l’état des lieux des collèges et lycées , etc …).

Dans le désordre, les discours se font simplistes et les équations à plusieurs inconnues, les calculs matriciels, les géométries variables et les causalités circulaires n’ont plus droit de cité, quand bien même l’équation  » LEGALISATION = REGLEMENTATION = DIMINUTION DE LA VIOLENCE ASSOCIEE  » semble faire « loi » comme en témoigne un rapport rendu public sur le site de l’IDPC  ( International Drug Policy Consortium ) en mai dernier, montrant que les achats sur les cryptomarchés étaient associés à moins de violence et de dommages et que leur répression devait être envisagée avec prudence au regard de la sécurité publique et sanitaire.

Si les mentalités changent, elles restent manifestement confinées dans les lieux où ça cause, où ça pense plutôt que dans ceux où les décisions se prennent !

Seules les lois des marchés blancs (Colorado et autres états d’Amérique), noirs, verts, gris, de l’ombre profonde, qui fleurent bon l’oignon, semblent aujourd’hui au-dessus des autres et permettent aux dealers comme à certains consommateurs privilégiés de tirer leur aiguille des jeux toujours interdits …

deep-web

 » L’Etat doit protéger les plus faibles … »

53-55DxOUn matin de juin 2016, sur le poste national encore un peu public, un des nombreux jeunes professeurs d’une de nos grandes et savantes universités (collègue que je salue au passage ) était interviewé à propos des jeux en lignes et des addictions auxquelles  ceux – ci peuvent conduire; rien de neuf à entendre :  » les sujets ne sont pas égaux devant les drogues et les comportements addictifs, c’est, pour une grande part, génétique ! « 

Et dans la foulée, nous entendons notre cher confrère répondre à l’habile journaliste (  » que doit – on faire pour endiguer ce phénomène plus que naissant ? » ): l’Etat, l’Institution, les Pouvoirs, la Communauté, la Société, doivent absolument protéger « les plus faibles » de ces nouveaux « fléaux »  et se résoudre (donc réduire sans réduire le moindre risque ) à interdire à tous pour éviter, au faible d’esprit, génétiquement programmé (alourdi par cette tare devenue, de surcroît, inévitable), de chuter, malheureux ange aux ailes déplumées, de tomber en grand Icare, de se voir soumis à son moi défaillant, de se laisser prendre au Jeu infernal (mais où étais-Tu lorsque tes enfants étaient faits esclaves et déportés en terre de Pharaon ? … Tiens, tiens, tout se tient !).

MilouDilemne

Est-ce bien compris ? Car en quelques minutes d’échange radiophonique, le message doit être court et clair …

Une fois encore, le « Médical » justifie, sans la nommer, la Prohibition, pour protéger le public le plus vulnérable, le sans défense, le faible d’esprit, en interdisant le plaisir du plus grand nombre au prétexte de l’abus minoritaire. Pas de morale, en apparence, rien que de la prévention compassionnelle.

Les jeux en ligne, les plaisirs virtuels, sont dangereux ( pour certains ); il faudrait les limiter, les interdire ( à tous ) afin de minimiser le danger ( est-ce que ça marche, personne ne le sait vraiment mais en tous cas on aura fait quelque chose de visible ! ) et, surtout, en faisant l’économie de l’idéal d’autonomie, en évitant de passer par les cases supposées inutiles des « promotion de la santé (mentale),  solidarité, intelligence originelle, libre choix, libre examen, et autres difficiles libertés » .

Et à cet autre jeu, accepterais-je de ne plus boire de l’alcool, sous quelque forme, au prétexte que 10 % de la population ne pourra pas en consommer avec modération ?

Non, for sure, et c’est avec cette drogue légale,  qui compose l’Eau de Vie et l’Eau de Feu, enfin reconnue comme bien plus dangereuse que toutes les autres réunies, en terme de morbidité et de mortalité, que renaît l’espoir d’un décalage d’avec la prohibition des « plaisirs sous influence »  et qu’ un double tabou ( Le Soir du 2 août 16 : Alcool : un tabou mortel doit tomber ) devrait tomber : l’alcool est la drogue la plus répandue mais seul son abus tue ( le tabou c’est l’abus tu )  et l’addiction qui peut accompagner sa consommation n’est qu’un obstacle important à sa « gestion » éclairée.

Ce n’est ni l’alcool ni l’alcoolique qu’il convient de faire disparaître mais bien les dommages liés à sa consommation, par le développement d’une posture « généraliste »: je décline sauvagement l’essence du nouveau Plan Alcool tant attendu même si déjà compromis, à la belge, et constate que celui-ci comprend, inclut,décline certains principes de la réduction des risques et minimise le principe jadis sacro-saint, du tout à l’abstinence ( sous la pression intéressée, bien entendu, du lobby alcoolier ) .

Abstinence ou réduction ( prévention ) des risques ( dommages ), limitation des dommages ou réduction des risques de dommages ?Devons-nous, pouvons-nous tolérer que les risques soient irréductibles car essentiels à la Vie hasardeuse et nécessaire, du photon au neurone,  » Du Soleil à l’Homme  » ( Henri Laborit ) ?

Nous reparlerons très bientôt … (hein, Cath ?)

Pour en finir avec le facteur génétique de l’addiction à l’alcool ( facteur qui n’est pas le seul à sonner deux fois, qui n’a pas, n’est-ce pas, le monopole de la détermination ) , faudra-t-il montrer, après-demain,  à la caisse du  » Paki », du « Nicolas », ou de toute bonne oenothèque, sa carte d’identité génétique et patte forte et résistante à l’addiction pour pouvoir acheter, en quantité, et grades et qualités désirées, tous ces calices au contenu savamment distillé ou délicieusement fermenté ?

Les gentils assureurs  » tous risques » vont – ils, demain, tarer leurs primes selon la structure plus ou moins « faible » de l’ADN de leurs gentils assurés ?

Pas encore, ouf, mais ce petit interview sur les jeux on line, dangereux demain ( et de vilains ),  et, par extension déclarée, sur les dangers des drogues et autres opiums du peuple,ce petit interview du petit matin de juin,  n’est rien moins qu’un nouvel épisode de cette série célèbre – les prodigieuses victoires de la Psychiatrie Biologique  et Moderne, clin d’oeil à Pierre Dac, ooooh – dont les co-producteurs, parfois bien malgré eux, (mais quelles responsabilités vous avez, merde, shit, faites gaffe !),  se recrutent tantôt dans les disciplines médico-psychologiques, tantôt dans les secteurs judiciaires et répressifs, tous agitateurs d’épouvantails et empêcheurs de dévier des droits ( communs ) chemins.

 

Confrères toubibs et collègues psy, méfiez-vous des journalistes de l’instantané qui, tout en vous donnant du Professeur -Spécialiste, tentent de vous faire dire tout ce qui peut confirmer les dangers et les peurs du genre humain ( sensations et frissons garantis ), et toutes les magies blanches qu’ils supposent que vous pourrez déployer (fééries et super-pouvoirs) pour le sauver  et sans lesquelles, seul et nu, il est à la merci des probabilités les plus terribles.